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Extraits de la table ronde

"Plongée en archives féministes"

Les extraits qui suivent proviennent de la retranscription d’une table ronde avec d’anciennes militantes des revues CLIT007/Bulletin de l’ILIS et L’Insoumise : Rina Nissim, Rosangela Gramoni et Marie-Martine Chautems ; accompagnées de Federica Martini, spécialiste de l’histoire de l’art d’un point de vue féministe. Elle a été organisée par notre collectif à l’occasion du vernissage de l’exposition « Plongée en archives féministes (1975-1986) – De la revue L’Insoumise à CLIT007 : dix ans de féminisme romand », le 5 octobre 2024 dans l’espace d’art Eeeeh ! à Nyon, que nous remercions ainsi que nos invitées. La modération a été assurée par Julie/Julot Wuhrmann et Val Bovey, qui s’est également assuré·e de l’édition et la sélection des extraits. La retranscription a été effectuée par des membres du collectif. Version complète en PDF à suivre. Bonne lecture !

 

Sur l’origine des revues

 

Rina Nissim 

Alors, au MLF, les revues sont des outils pour faire passer nos idées. L’Insoumise est sortie d’abord, c’était un groupe qualifié de féministe radical anarchisant. Et c’est au sein de L’Insoumise qu’on s’est retrouvées plusieurs lesbiennes se rendant compte que nos sujets ne les intéressaient pas vraiment : nous on militait pour le droit à l’avortement mais elles ne nous renvoyaient pas vraiment l’ascenseur. Donc un jour on s’est dit, ça y est, on fait un fanzine, donc CLIT007, c’était un Concentré Lesbien Irrésistiblement Toxique, et notre mission c’était de politiser les lesbiennes de bar. (rires) On était politisées et on trouvait que, il y avait plusieurs bars formidables, dont La Bretelle, où il y avait des lesbiennes qui se réunissaient très régulièrement. On essayait d’amener quelques idées révolutionnaires. On organisait le Bal des Chattes Sauvages tous les mois. Alors là, elles venaient les lesbiennes ! Alors on interrompait la musique toutes les vingt minutes sur diverses choses politiques, ça, ça ne leur plaisait pas. 

 

Sur l’écriture collective 

 

Marie-Martine Chautems

En fait, on écrivait souvent à deux. J’ai retrouvé des textes que j’ai écrits avec une nommée Girouette, moi je m’appelais Pirouette… [...]  J’ai retrouvé avec surprise certains textes que j’avais complètement oubliés. On écrivait à deux et le choix de ne pas donner nos noms, c’est parce qu’on ne voulait pas de vedettariat, je crois que c’était ça aussi. On était en dehors du star système complètement. Ça ne nous intéressait absolument pas. Il y avait aussi un petit goût pour la clandestinité, je crois. « Les lesbiennes parlent aux lesbiennes » : il y avait un petit côté comme ça. On se faisait plaisir avec une attitude un peu clandestine. Mais cette attitude clandestine, quand on a manifesté lors de la rencontre Gorbatchev-Reagan ça a été un gros raout, à Genève – on est sorties avec une bande complètement dingo qui disait : Quand on voit ce qu’on voit et qu’on sait ce qu’on sait, on a raison de penser ce qu’on pense. (rires dans la salle). C’était le degré zéro de la dérision.

 

Sur le travail gratuit et le militantisme 

 

Rina Nissim

On avait un avantage : la situation économique était assez bonne. Les premières féministes, vous savez comment elles s’en sortaient : elles avaient des maris qui avaient des bons boulots et leur travail de mécénat, c’était éventuellement de faire du féminisme, lutter pour l’accès au vote. Notre génération, c’était nous qui avions les bons boulots. Ça veut dire qu’on avait des bons boulots bien payés, qu’on pouvait éventuellement faire à temps partiel et qui nous laissaient le temps de militer à côté. C’était comme ça que ça fonctionnait ! C’est nous qui injections l’argent, évidemment : on avait des abonnées, mais on n’aurait jamais tenu le coup sans nos propres fonds. Pour la nouvelle génération, la situation économique n’est pas la même. Il faut que vous ayez deux boulots pour vous en sortir. Et puis du coup, si vous devez trop ramer pour votre survie, ça devient difficile de militer à côté.

 

Rosangela Gramoni

[...] Parce que ce que je peux voir, c’est que la répression est de plus en plus grande. La surveillance est…  Moi, ça fait quinze ans, voire vingt ans, que je parle d’une maladie sociale – ou c’en est deux, qui se renforcent l’une l’autre : la controlite aiguë et la sécuritose chronique évolutive. Et ça, c’est ce qu’on vit de plus en plus à l’heure actuelle. Et je trouve que c’est très, très dur, parce qu’à l’époque, nous dans les années 1970, quand on allait faire un affichage sauvage, il n’y avait pas des caméras partout. Donc voilà, on regardait s’il y avait des flics qui se pointaient, et puis on faisait nos collages sans problème. 

 

Sur les archives féministes 

 

Federica Martini

[...] C’est que quand on s’engage dans le féminisme, on sait qu’on doit écrire sa propre histoire et on sait aussi qu’on ne peut pas complètement faire confiance aux institutions. Donc, souvent, les sources et les documents sont rares, mais il y a aussi une spécificité, c’est qu’on peut les trouver à plusieurs endroits. Donc on arrive, en effet, à avoir une trace institutionnelle, par exemple par l’engagement d’enseignant·e·x·s dans une université, et donc on va trouver un fonds. Mais on sait qu’il risque de descendre dans les dépôts pour certaines périodes. Et puis après en effet, il y a des nouvelles générations qui s’engagent dans ces histoires et qui vont essayer de les faire sortir mais on n’arrive jamais à avoir une visibilité linéaire. Il y a toujours une forme de clignotement et un risque de disparition

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Notre dernière revue, vernie en octobre dernier, est à présent disponible, également en pdf sur notre site !

 

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Résidence à Eeeeh! - 4 octobre - 27 octobre 2024
exposition, table ronde, vernissage de la revue 7, Concert de Baran Özer en soutien à la Palestine, atelier d'écriture autour de Gloria Andalzùa, finissage et DJ set par Kween K

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